Parmi les leviers de notre réindustrialisation :
politique publique, sens et compétences
Un article rédigé par :
Patrick TALER – Directeur Associé en charge de la revitalisation et de la réindustrialisation – Sémaphores – in
La part que représente l’industrie dans notre PIB affiche une diminution régulière : celle-ci ne pesant plus que 12,4% du PIB en France, dont 10 % pour l’industrie manufacturière. Cette situation nous place à titre de comparaison loin derrière l’Allemagne (plus de 20%), mais devant le Royaume Uni (sous les 9%).
La tertiarisation poussée de notre économie pèse toutefois sur notre déficit commercial, dont la balance demeure fortement dépendante des activités industrielles, qui concentrent la quasi-totalité de nos exportations (près de 97%), pour, pratiquement, 450 milliards d’euros.
Ajoutons à cela que chaque emploi industriel génère 3 à 4 emplois induits dans les services, et que notre production manufacturière subit un nouveau recul depuis la fin du premier semestre 2024, impactant particulièrement les secteurs de la construction mais également de l’automobile et des biens d’équipements…C’est dire si l’enjeu de préservation de notre outil industriel est de taille.
Travailler à une politique publique efficiente…
L’État affiche une politique de soutien volontariste à l’égard de la R&D portée par le secteur industriel, qui concentre chaque année près de 4/5 des efforts engagés.
Les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et les grandes entreprises (GE) sont les principales bénéficiaires des aides à la R&DI, percevant environ 66 % du montant des aides indirectes, bien que représentant moins de 10 % du nombre d’entreprises bénéficiaires.
« La tendance vise à favoriser désormais les projets de taille importante, à impact fort, et au bénéfice des activités à forte intensité technologique et de connaissance : une enveloppe de 54 milliards d’euros, engagée aux 2/3, est ainsi dédiée au programme France 2030. »
L’action du gouvernement conjugue la stratégie de rééquipement de notre outil industriel avec celle de sa décarbonation, poursuivant un objectif de réduction de près de moitié des émissions de gaz à effet de serre à horizon 2030 ; politique mise en œuvre dans une vision public-privée au travers des contrats de transition conclus avec les 50 sites industriels les plus polluants.
…pour répondre à l’émergence de projets nouveaux, innovants et porteurs de sens
Dans le cadre des missions confiées à Sémaphores dans le champ de la réindustrialisation, nous travaillons au réemploi des espaces industriels désengagés, au bénéfice des entreprises en quête de nouvelles capacités ainsi que des territoires, acteurs de leur développement économique. De plus en plus, les enjeux de préservation des compétences nous conduisent à explorer les passerelles favorisant le réemploi du personnel rendu disponible à la suite de réorganisations chez le nouvel exploitant.
Nos missions de revitalisation, nous conduisent également à accompagner l’émergence de projets s’inscrivant dans une logique d’économie circulaire B to B, ce qui n’était pas si fréquent auparavant, en s’inscrivant parfois dans de nouveaux modèles économiques dont la fiabilité s’établit sur un cycle long.
« C’est nouveau et de mieux en mieux perçu par les acteurs institutionnels qui font confiance aux porteurs de projets ! Ceux-ci portent également des convictions affirmées autour de l’importance du travail et de la relation de travail pour les personnels concernés, qui parfois, avaient pris leurs distances avec le monde de l’entreprise. »
Et assurer, de manière agile, le maintien de compétences académiques affirmées, mais également plus ouvertes et intégratrices en termes de parcours…
Les écoles d’ingénieurs, et leurs laboratoires intégrés, sont également l’une des pierres angulaires de la stratégie de réindustrialisation, celles-ci s’attachant à développer des catalogues de formation ouverts à des profils plus variés et intégrant de plus en plus les enjeux de décarbonation et de durabilité.
Mais, au-delà de ces formations académiques de haut niveau, les moyens sont désormais orientés vers les formations de terrain. Il s’agit de favoriser le retour de qualifications spécialisées sur les métiers identifiés en tension au travers du développement des aides dédiées, notamment à l’apprentissage, et ce, en vue de mobiliser les ressources d’un appareil de formation repositionnant l’entreprise au cœur des enjeux de notre « rééquipement ».
« C’est un terrain sur lequel le rôle des Seniors, expérimentés et en recherche de sens pour leur dernière partie de carrière, s’avère primordial dans le domaine du transfert de compétences ; soit en prenant part à des actions collectives de formation organisées au sein de Centres d’Apprentissage naissants dans les établissements industriels, soit en activant des missions de mentorat auprès de nouvelles générations en prise avec le terrain ».
Piloter une démarche de réindustrialisation, c’est ainsi et avant tout engager des politiques publiques volontaires, savoir accueillir de nouveaux projets et travailler bien évidemment notre socle de compétences.