À l’approche d’Octobre Rose, faisons le point sur l’inclusion des personnes atteintes de maladies chroniques en entreprise

Le mois d’octobre est l’occasion d’avoir plusieurs causes nationales qui s’adressent à de nombreuses personnes, de nombreuses familles, de nombreux aidants, car ces derniers trouvent leur vie personnelle et professionnelle chamboulée par la maladie. L’une d’entre elles est celle d‘Octobre Rose, dont la mission, depuis 2015, est de sensibiliser pour la prévention et le dépistage du cancer du sein, qui reste la première cause de mortalité par cancer chez les femmes. Le cancer est une maladie chronique.

L’OMS rappelle qu’en France, 1 femme sur 8 a des risques de développer un cancer du sein au cours de sa vie et qu’un dépistage anticipé et précoce d’un cancer du sein augmente les chances de guérison à 5 ans de 90%.

En 2023, la 30e édition d’Octobre Rose a lieu, comme tous les ans, du samedi 1er octobre jusqu’au lundi 31 octobre, un mois propice à de nombreuses manifestations et événements, qui sont organisés au profit de la recherche et du dépistage précoce du cancer du sein. À titre informatif, parmi les maladies chroniques, nous comptons les affections cardiovasculaires (hypertension…) : 32 %, le diabète : 25 %, les cancers : 20 % et les affections psycho-psychiatriques : 14 %.

Depuis quelques années, les entreprises se sont emparées du sujet en accentuant leur action dans l’accompagnement de la maladie chronique qui touche 1 salarié sur 5 en France et 20 millions de Français. Pouvez-vous, Patricia Ardillier, nous définir ce qu’est une maladie chronique ?

PA : La maladie chronique évolutive correspond à un état pathologique appelé à durer dans le temps, qui entraîne une limitation fonctionnelle de l’activité, la dépendance à un médicament et la nécessité de s’inscrire dans un parcours de soins médico-social. Par exemple, les maladies cardio-vasculaires, les polyarthrites rhumatoïdes, le VIH-sida, le cancer, l’endométriose, le diabète, la sclérose en plaques et l’asthme sont des maladies chroniques.

Que peuvent proposer les entreprises dans leur programme d’accompagnement des salariés concernés ? Comment éviter d’exclure ces salariés porteurs de pathologies chroniques, et comment leur assurer une égalité des chances au niveau du travail comme n’importe quel autre salarié ?

PA : Selon des statistiques du ministère de la santé, 20 millions de personnes en France sont atteintes de maladies chroniques, pour lesquelles les chances de guérison dans les conditions de la médecine actuelle sont quasi nulles.
Compte tenu de l’effectif concerné, ce sujet doit être une question de l’innovation sociale premium de l’entreprise et des directions RH/RSE.
D’ici plus d’un an, en 2025, un salarié sur quatre sera porteur d’au moins une maladie chronique. En effet, les nombreux dépistages absents durant la période de confinement ont accéléré ce phénomène.
Et selon une étude de l’Anact, 80 % des porteurs de pathologies chroniques sont en poste au moment du diagnostic, et un tiers d’entre eux ne sont plus actifs deux ans plus tard. Ce triste chiffre démontre que le maintien en emploi de ces salariés reste encore un enjeu prioritaire pour les entreprises.
J’ai accompagné de nombreuses personnes concernées et lorsque la maladie chronique se déclare, vous oscillez entre des moments où on est en forme et des moments où on est moins disponible pour l’entreprise, et d’autres où on a besoin que l’entreprise s’adapte.
Il est dans ce cas primordial que l’organisation soit souple pour permettre une qualité de vie au travail de la personne porteuse de maladie chronique et répondre aux exigences de performance de l’entreprise.
Selon la Ligue nationale contre le cancer, 60 % des personnes qui ont un cancer en guérissent.

Comment gérer la maladie chronique en entreprise, avons-nous une loi qui fixe les règles ?

PA : Il est important de rappeler qu’au titre du droit au respect de la vie privée, l’employeur ne peut pas exiger d’informations sur la vie personnelle ni sur l’état de santé du salarié, et donc, il n’y a aucune obligation pour un salarié d’évoquer son état de santé. Et la médecine du travail est tenue au secret médical ; en conséquence, les informations médicales n’ont pas à être transmises à l’employeur. La maladie est donc protégée par le secret professionnel.
En revanche, chacun peut prendre la décision de parler de sa maladie et je le recommande, chaque fois qu’il faut réfléchir à des aménagements permettant le maintien dans l’emploi. C’est très précisément dans l’accompagnement de ce cheminement qu’un consultant spécialisé dans l’accompagnement de personnes en situation de handicap prend tout son sens. Nous intervenons auprès de nos clients pour faciliter les échanges avec les différents interlocuteurs mais aussi pour mettre en place un dispositif de maintien dans l’emploi.

Pouvez-vous nous expliquer en quoi le dispositif de maintien en emploi aide ?

PA : Ce dispositif recouvre les mesures permettant d’accompagner les personnes avec un problème de santé ou un handicap, pour les aider précisément à conserver un emploi, notamment en aidant à la coordination des différents acteurs comme le Service de Santé et de Prévention au Travail, Cap Emploi, l’Agefiph…
Lorsque l’entreprise mène une politique RH d’inclusion de personnes en situation de handicap, nous pouvons évoquer la situation avec le service RH ou l’encadrement et voir avec eux les compensations qu’il faut mettre en place pour faciliter le maintien en emploi.
Nommer sa pathologie n’est pas toujours utile. L’enjeu est plus de réfléchir et de partager ensemble sur les actions de compensation à mener pour permettre le maintien en emploi.

Quels conseils pourriez-vous donner aux entreprises pour qu’elles facilitent l’accompagnement de personnes atteintes de pathologie chronique ?

PA  : Sensibiliser, former les managers et mettre en place le cadre qui va bien pour libérer la parole sur la maladie. Par expérience et forts de nos 20 ans d’accompagnement de personnes en situation de handicap, nous remarquons avec mes équipes TH Conseil, que plus on sensibilise le management et les collaborateurs au sujet de la maladie et du handicap, plus on valorise les retours d’expérience positifs et plus on libère la parole des collaborateurs.
Il faut aussi travailler à l’ergonomie des postes : les maladies chroniques évolutives engendrent des incapacités plus ou moins importantes, alors une révision des aménagements s’impose en fonction de l’évolution de la maladie. L’ergonomie des postes est donc un point capital.
Au-delà de travailler sur l’ergonomie des postes, l’organisation du travail, comme le télétravail ou la variabilité des horaires et une diminution de la charge de travail, sont nécessaires.

Cancer et emploi : on en parle beaucoup, de nombreux employeurs signent des chartes. Pouvez-vous nous en parler ?

PA : En effet, depuis avril 2022, sous l’impulsion d’Arthur Sadoun, Président du groupe Publicis, de nombreuses entreprises se sont ralliées à la Charte pour faire évoluer les mentalités et inciter à la transparence, à la fin du secret du cancer.
De nombreuses associations comme l’Institut Rafael, La ligue Nationale et Cancer@work, luttent activement contre le cancer et pour la prévention. L’Institut Rafaël sous l’impulsion d’Alain Tolédano, son fondateur, et Aurore Deligny, sa Directrice Générale, lance même Rafael Prévention Santé.
La maladie chronique en entreprise est une singularité que nous adressons au sein de TH Conseil, en accompagnant nos clients dans leurs plans d’actions et leurs dispositifs RH, afin de permettre aux employés en situation de maladie chronique de se sentir pleinement inclus et soutenus par leurs collègues et managers. Dans le cadre d’Octobre Rose, nous déployons au sein des entreprises des conférences et des sensibilisations sur Travail et Cancer.